Le 14 décembre dernier, au Palais des Sports du Gosier, Misié Sadik a livré un concert d’une qualité rare.
Une performance habitée, généreuse et maîtrisée. Une scénographie ambitieuse, un son puissant, un public au rendez-vous. Pendant près de deux heures, l’artiste a rappelé, s’il en était encore besoin, pourquoi il est aujourd’hui l’une des voix majeures de la scène guadeloupéenne et caribéenne.
Il y a des concerts que l’on ne peut pas manquer. Ceux pour lesquels, si l’on peut et si l’on veut vraiment les honorer, il faut être présent. Le concert de Misié Sadik faisait clairement partie de ceux-là. Je l’attendais depuis des années, moi qui l’avais vu pour la dernière fois sur scène en 2013, dans une salle comble à l’Archipel de Basse-Terre.
Il était temps, en cette fin d’année 2025, de retrouver cet artiste talentueux en concert. C’était aussi ma première fois au Palais des Sports du Gosier pour ce type de manifestation. Heureuse d’y être, je me laisse porter par l’ambiance, malgré une chaleur déjà écrasante .Dès les premières notes, je me suis rappelée pourquoi je l’écoute depuis son premier album pli lwen ki zyé. J’oublie cette chaleur et je me concentre sur cette prestation Magistrale. Misié Sadik a livré une prestation généreuse, intense, sincère. Une générosité artistique qui, paradoxalement, a aussi soulevé une question essentielle.
Sur le plan artistique, la prestation a été à la hauteur des attentes. Présence scénique affirmée, répertoire maîtrisé, échanges constants avec le public : Misié Sadik a livré un concert généreux, porté par une vraie exigence artistique. Une générosité largement saluée par le public.
Un concert réussi, un cadre perfectible
Si la performance de l’artiste ne souffre d’aucune contestation, le lieu, en revanche, interroge. Le Palais des Sports du Gosier, infrastructure conçue avant tout pour les événements sportifs, accueille régulièrement des concerts faute de salles de spectacle adaptées en Guadeloupe.
Avec une capacité d’environ 6 000 personnes selon les configurations, le site permet de rassembler un large public. Mais ses limites apparaissent rapidement lors d’événements musicaux d’envergure : acoustique difficile, visibilité inégale selon les zones, circulation parfois complexe et, ce soir-là, une chaleur particulièrement élevée dans la salle. Car, ce dernier, était complet comme un agoulou !
Ce concert met en lumière une problématique plus large, régulièrement soulevée par les artistes et les professionnels du secteur culturel : l’insuffisance d’infrastructures dédiées au spectacle vivant en Guadeloupe. Les artistes locaux, dont Misié Sadik fait partie, démontrent pourtant leur capacité à proposer des spectacles ambitieux et à mobiliser un public fidèle. Le décalage entre le niveau artistique et les moyens techniques disponibles devient alors de plus en plus visible.
Et si tu me lis, Misié Sadik, sache que ta musique m’accompagne depuis bientôt vingt ans, dans les bons comme dans les moments plus difficiles. J’ai suivi ton parcours depuis Pli lwen ki zyé, album après album, que je possède tous. Ce concert a confirmé ce que beaucoup savent déjà : ta rigueur, ta constance et ta générosité élèvent la scène locale.
Le concert de Misié Sadik rappelle une chose essentielle : la Guadeloupe dispose d’artistes de haut niveau, capables de porter des spectacles ambitieux et de rassembler un public fidèle. Le talent est là, l’engagement aussi. Il ne reste plus qu’à offrir à cette richesse culturelle les espaces qu’elle mérite. Car lorsque l’art est aussi fort, il mérite un écrin à sa hauteur.
Stécy LANCASTRE
Journaliste
Crédits photos : LBTM MUSIC